Couverture du livre Les déracinés de Catherine Bardon
Drames,  Romans historiques,  Sagas Famililales

Les déracinés – Catherine BARDON

Merci à la maison d’édition Les Escales et à l’auteure Catherine Bardon qui ont offert, via un post Instagram, le premier tome de la saga « les Déracinés ». Ce 1er opus d’une trilogie m’a séduite grâce à son incroyable richesse historique et à une fin intense !

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Résumé :

Wilhem et Almah se rencontrent à Vienne en 1931. C’est le début d’une belle histoire d’amour mais la montée de l’antisémitisme perturbe leur vie jusqu’à l’exil. Leur périple va les conduire en République Dominicaine, grâce à un accord passé par le dictateur local Trujillo avec les autorités américaines et l’American Jewish Joint Distribution Committee. Un nouveau chapitre commence alors pour eux, dans le but de bâtir une communauté et de reconstruire leur vie.

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Mon avis littéraire :

Ce roman repose sur des faits réels, des témoignages et des documents d’époque.

Catherine Bardon

C’est toute la force de ce livre, j’adore les romans historiques pour cela!

L’auteure a divisé le roman en 3 parties. J’en ajouterai une 4ème : la fin, qui mérite bien une partie à elle. Nous avons donc :

  • Les corbeaux noirs = La montée de l’antisémitisme en Autriche
  • Errance = L’exil
  • Inventer le paradis = La vie en République Dominicaine
  • La fin

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Première partie : La montée de l’antisémitisme en Autriche

L’histoire commence en 1921 en Autriche avec l’enfance de Wilhem de sa sœur Myriam. Ses parents, son envie de devenir journaliste et pour finir la rencontre avec Almah et le début de leur histoire d’amour.

Le livre est écrit majoritairement de son point de vue, sauf quelques chapitres où un narrateur extérieur prend le relai. Pour ma part, j’ai trouvé Wil un peu vieux jeu ! Il se met la pression dans son rôle d’homme, de protecteur de la famille, mais j’imagine que c’était normal à l’époque. J’aurai aimé avoir quelques chapitres écrit du point de vue d’Almah. Quelle femme! Almah est en avance sur son temps et c’est une vraie graine d’héroïne!

En parallèle de l’histoire d’amour de Wil et Almah, nous suivons la montée en puissance du nazisme. Déjà à ce stade, on sent que l’auteure est très bien documentée et nous relate les événement historiques de manière précise mais toujours en fond de décor de l’histoire de notre couple.

L’Autriche bascule plus en plus du côté obscur, et j’avais envie de leur hurler « PARTEEEZ VITE »! Ils ont attendu assez tard pour quitter leur pays. Evidemment, c’est facile de dire cela pour nous qui connaissons l’histoire et ne sommes pas à leur place. Eux, n’osaient pas partir. Au début pour ne pas abandonner leurs parents qui souhaitaient rester (et se pensaient à l’abri car âgés). Ensuite ils ne pensaient pas que tout ça puisse arriver, les événements étaient tellement inimaginables…
Ceux qui s’en « sortent bien » sont ceux qui sont partis dès le début car ils le pouvaient et ont pu transférer leur argent.

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Deuxième partie : L’exil

J’ai adoré cette partie car j’ai appris énormément de faits historiques. Pour une fois nous parlons de la guerre côté émigrés.

Pour commencer, il y a la conférence internationale d’Evian organisée à l’initiative de Roosevelt en juillet 1938. A la suite de la création du « Grand Reich » en avril, l’afflux de migrants dans le monde augmente considérablement. Hitler a même proposé de contribuer à l’expulsion des juifs dans les pays prêts à les accueillir.

« J’espère que le reste du monde, qui a une telle sympathie pour ces criminels, aura suffisamment de générosité pour convertir cette sympathie en aide effective. Pour nous, nous sommes prêts à mettre ces criminels à la
disposition de ces pays, et même sur des bateaux de luxe, peu importe.»

Adolf Hitler — 1938

Mais, comme aujourd’hui (rien n’a changé!), l’accueil des migrants n’a pas enthousiasmé les autres pays. Aucune mesure concrète n’est ressortie de cette conférence, à part la République Dominicaine qui a proposé l’accueil de 100 000 Juifs. Certains pays avaient déjà mis en place des quotas assez limités pour accueillir les réfugiés du Reich. D’autres encore, acceptaient uniquement certaines professions, comme s’ils faisaient leur marché sur des vies humaines.

Wil et Almah luttent pour obtenir un visa pour les Etats-Unis, mais doivent d’abord transiter par un camp en Suisse. A la base avec un visa temporaire de 8 jours, ils y resteront finalement plusieurs mois.

Encore une information « incroyable » décrite dans ce livre. Le gouvernement Suisse a fermé sa frontière en 1938, après la conférence d’Evian, avec le slogan «La barque est pleine ». Il refoulait les ressortissants du Reich qui ne pouvaient pas fournir un visa pour un autre pays d’accueil.

Les Etats-Unis également ne sont pas en reste. Ils avaient fixé des quotas par origine, largement atteints en 1938. Wil et Almah, comme beaucoup d’autres, se retrouvent donc coincés sur Ellis Island. Soit les migrants trouvaient un visa pour un autre pays, soit ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine.

Heureusement pour eux, en Suisse ils ont découvert le Plan DORSA en République Dominicaine.

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Troisième partie : La vie en République Dominicaine

Wil et Almah arrivent finalement en République Dominicaine, après la déception américaine. Une nouvelle vie commence pour eux, et ils en ont déjà vécu plusieurs !

A la conférence d’Evian en 1938, seule la République Dominicaine avait répondu favorablement pour accueillir au moins 100 000 juifs. Bien sûr cette décision du dictateur Trujillo était motivée par des intérêts géopolitiques et économiques : restaurer son image sur la scène internationale après le massacre des Haïtiens en 1937, participer à l’essor du pays avec l’apport d’un capital humain qualifié et contribuer à « éclaircir » la population. L’accord entre Trujillo et les Etats-Unis, aidé par le JOINT a fait naître le plan DORSA (Dominican Republic Settlement Association) qui eut en charge l’installation des réfugiés dans la ville de Sosúa au nord de l’île.

C’est une période d’adaptation mais plus tranquille pour nos protagonistes. Ils l’ont bien mérité mais c’est la partie du livre que j’ai un peu moins aimé.

On découvre la mise en place de leur communauté, basée sur un système de Kibboutz. Il s’agit d’un village collectiviste sioniste, fondé sur les principes de propriété collective et de coopérativisme pour l’éducation et la vie en général.

A part l’évolution de la structure de la communauté, il ne se passe pas grand chose à mon goût. Quelques amitiés, les bêtises des enfants, … mais je me suis peu attachée à leurs amitiés et nouvelles rencontres.

Quelques passages intéressants tout de même sur les doutes de Wil par rapport au projet lorsqu’il ne fonctionne pas autant que désiré. Après le soulagement des débuts, le journaliste en lui refait surface et ne supporte plus d’avoir quitté un régime totalitaire pour un autre en fermant les yeux sur le reste du pays.

« Toutes nos semences, tous nos engrais, tous nos insecticides venaient d’une unique entreprise, un géant américain. Monsanto. Pourquoi le Joint avec l’aide  de Monsanto, s’acharnait-il à nous faire planter des semences qui ne donnaient rien ? Les doutes pouvaient s’étendre à Bayer qui nous fournissait l’essentiel de nos vaccins, de nos médicaments et les traitements antipaludéens »

Wil

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Quatrième partie : La fin

Elle représente, pour moi, une partie à part entière. J’ai trouvé les derniers chapitres très émouvants, j’en ai eu la gorge nouée. J’ai ressenti des émotions que j’avais attendu dans la 3ème partie pendant la vie en république Dominicaine.
C’est cette fin qui me donne envie de lire la suite… Mais peut-être pas tout de suite, le temps de bien digérer tout ce livre de tout de même plus de 600 pages !!

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Bonus

Dans les remerciements, un mot de Catherine Bardon à Caroline Laurent qui a cru à ce roman et à « cette aventure éditoriale » nous indique leur travail commun sur ce livre. Pour rappel, Caroline LAURENT est l’auteure, avec Evelyne Pisier, de « Et soudain la liberté » (Les Escales, 2017) que j’avais adoré et dont je vous propose une critique ici. Je commence à me dire que Mme Laurent a beaucoup de talent, je vais donc la suivre d’un peu plus près ;).

Un petit paragraphe concerne Les «Mariposas », dont j’avais déjà fait la connaissance dans les Culottées de Pénélope Bagieu. Ces trois femmes ont lutté toute leur vie contre le dictateur Trujillo.

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Extraits :

« J’éprouvais un drôle de vague à l’âme, d’autant plus incompréhensible que le voyage m’avait paru n’en plus finir et que j’étais soulagé d’arriver. N’étant pas à un paradoxe près, je me faisais la réflexion je m’étais vite habitué au train-train anesthésiant de la vie à bord. Comme ça avait été simple de limiter sagement ma vie à flâner et rêver dans cette coquille flottante, une bulle suspendue dans l’espace et dans le temps où je n’étais pas coupable d’être passif. J’avais aimé la monotonie de ces journées interminables où je n’étais personne.« 

« Elle déroula le petit billet roulé dans l’anneau. « Je ne sais pas où va mon chemin, mais je marche mieux quand ma main serre la tienne. »« 

« Sans racines, nous ne sommes que des ombres« 

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